… Jeudi, bien avant que le secrétaire général de l’Elysée n’annonce la promotion de Delphine Batho à son ministère, Nicole Bricq rentre de Rio, où elle a piloté la délégation française au Sommet de la Terre. Quand la sénatrice de Seine-et-Marne apprend par téléphone le jeu de chaises musicales la visant, son entourage la dit «meurtrie».
Colère. Si la ministre est privée de son maroquin, c’est notamment parce qu’elle a pris, avec Arnaud Montebourg, une décision totalement inattendue . Autant pour les groupes Shell, Total et Tullow Oil, qui convoitent le gisement Zaedyus, que pour Matignon et l’Elysée. Mais saluée par les associations de défense de l’environnement. Elle a refusé, «en parfaite harmonie avec le ministre du Redressement productif», de signer des arrêtés actant le démarrage des travaux d’installation de la plateforme de Shell dans l’océan Atlantique. Et annoncé, par voie de communiqué, le 13 juin, la «remise à plat» des permis d’exploration accordés il y a plus de onze ans par le gouvernement Jospin. En clair, une suspension des travaux.
A Matignon, «ils étaient fous furieux», confie un conseiller : «Juridiquement, la suspension ne tenait pas la route, commente a posteriori un industriel du secteur. On ne peut pas annuler un permis d’exploration sans raison une fois qu’il a été accordé. La loi ne le prévoit pas, c’est normal, des coûts ont déjà été engagés.» Shell s’est-il engouffré dans la faille pour demander la peau de Bricq ?
«Evidemment non, nous n’avons pas demandé la tête de Mme Bricq», se défend Jean-Louis Schilansky, le président de l’Union française des industries pétrolières (Ufip). Qui reconnaît cependant sans ambages son intervention dans le dossier. «On a fait remarquer que la décision de ne pas signer les arrêtés de démarrage des travaux était grave. Nous étions très, très inquiets. C’est extrêmement rare de suspendre des permis, fait-il valoir. Aujourd’hui, nous sommes rassurés, les choses reprennent leur cours.»
Côté Total, on dit ne pas avoir vu le coup venir. Pour Christophe de Margerie, le PDG du groupe français,
la surprise a été d’autant plus forte qu’il a eu un tête-à-tête avec Arnaud Montebourg à Bercy la veille de la suspension. Dont il n’a absolument pas été question. Margerie avait même inscrit à son agenda un rendez-vous avec Nicole Bricq début juillet.
Jean-Etienne Antoinette, sénateur socialiste de Guyane, ne doute pas, lui, d’une intervention de Shell. «Cela fait partie des rapports de force», banalise le maire de Kourou, qui Continuer la lecture de Quand le gouvernement Ayrault et son ministre Montebourg se couchent devant le lobby pétrolier. →