Le rédacteur en chef d’un des principaux journaux français était un espion du KGB
Il est apparu que le rédacteur en chef de l’un des principaux journaux français pendant la guerre froide a été un espion du KGB pendant 35 ans.
Philippe Grumbach était rédacteur en chef du L’Express de 1956 à 1960, avant de devenir directeur de la rédaction en 1974.
Aujourd’hui, l’actuel rédacteur en chef du journal, Etienne Girard, a mené une enquête dans les archives du KGB et a révélé dans l’édition de jeudi (15 février) du journal que M. Grumbach était en fait « un traître à la France qui, pendant 35 ans, a prêté serment au KGB ». Il était connu sous le pseudonyme de Brok.
M. Girard a déclaré que M. Grumbach n’utilisait pas le journal pour l’aider dans ses missions auprès du KGB, mais qu’il se servait de sa position pour détourner l’attention de ses véritables intentions.
M. Girard a expliqué : « C’était pendant l’élection présidentielle de 1974. Au sein de la L’Express Philippe Grumbach, membre de l’équipe éditoriale de l’Express, semble plus favorable au centre-droit. [But] en secret, il avait été chargé par le KGB de faire perdre la droite à François Mitterrand ».
La candidature de M. Mitterrand n’a pas abouti, le vainqueur, Valéry Giscard-d’Estaing, l’ayant battu avec une marge record de seulement 1,6 %. M. Mitterrand remportera les élections de 1981, devenant ainsi le premier président de gauche sous la Cinquième République.
M. Girard a rédigé – avec Anne Marion, responsable des archives du journal – un rapport sur son enquête dans les archives du KGB, et a déclaré que, bien qu’étant « un ami proche de Mitterrand et de Giscard, il était, à l’insu de tous, l’un des plus grands espions soviétiques de la Cinquième République ».
La famille de M. Grumbach a confirmé les résultats de l’enquête. Il est décédé en 2003 à l’âge de 79 ans.
Le fait que son ancien rédacteur en chef ait été un espion du KGB touche au cœur des valeurs du journal, a déclaré M. Girard.
Avec le directeur de la rédaction Eric Chol, il écrit dans le dernier numéro : « Il était impossible de ne pas révéler ce passé trouble au sein d’un journal qui s’est toujours attaché à combattre les utopies totalitaires et les ravages du communisme ».
Rôles des médias
M. Girard a déclaré que M. Grumbach avait réussi à « infiltrer les plus hauts niveaux du gouvernement et des médias ».
Outre ses fonctions de rédacteur en chef à L’ExpressAu cours de sa carrière, M. Grumbach a également été secrétaire de rédaction à l’AFP de 1946 à 1948, et a collaboré à des journaux Libération et Paris-Presse-l’Intransigeant. Il a fondé l’hebdomadaire aujourd’hui disparu Pariscope en 1965, puis a dirigé le magazine satirique (également disparu) Le Crapouillot.
Membre du Haut Conseil de l’Audiovisuel (1977-1981), il devient producteur de films avant de rejoindre le Conseil de l’Europe. Le Figaro en 1984.
Le rédacteur en chef actuel s’est demandé si M. Grumbach n’était pas d’abord devenu un espion « par idéologie », avant de le rester « pour l’argent ».
Menaces actuelles
M. Chol a également utilisé l’éditorial pour établir des parallèles entre les actions de M. Grumbach et le contexte politique actuel.
Il a déclaré : « Cette pénétration soviétique des sphères du pouvoir pendant la guerre froide nous impose un devoir de vigilance ».
Il a fait référence aux récentes tentatives d’ingérence étrangère en France, après que Rachid M’Barki, ancien présentateur du journal télévisé de BFMTV, ait été licencié après qu’une enquête ait révélé que des forces extérieures avaient influencé son travail.
Il a été accusé de favoriser des pays tels que le Maroc et le Bahreïn, et de ne pas suivre les directives éditoriales appropriées en diffusant des histoires qui n’avaient pas été approuvées par ses patrons rédacteurs.
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